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Don’t make our mistake ! (Ne faites pas notre erreur !)

Article publié le 23 octobre 2014 par Pour l'Unité dans Chronique @

C’est une alerte, un cri d’alarme lancé par un spécialiste des soins palliatifs néerlandais, le Docteur Boer aux parlementaires britanniques qui s’apprêtent à adopter en seconde lecture, un texte légalisant l’euthanasie active en Grande-Bretagne.

 

Une alerte doublement intéressante et inquiétante. C’est un spécialiste de la fin de vie  et du suicide médicalement assisté qui nous interpelle mais aussi un homme qui était favorable au changement de législation dans son pays il y a douze ans. Le voilà qui fait désormais machine-arrière tout en prévenant ses confrères anglo-saxons qu’une fois le « mauvais génie » libéré de sa lampe, il sera bien difficile de la lui faire réintégrer[1].

 

Pour lui, légaliser le suicide médicalement assisté et l’euthanasie active, c’est-à-dire donner délibérément un produit à un patient dans le but d’occasionner sa mort est une pente glissante vers la mise à mort généralisée des personnes malades.

 

En 2002, il militait ardemment en faveur du droit de « choisir sa mort ». En douze ans, il a vu évoluer les pratiques et mentalités. D’une loi d’exception et de dernier recours, l’euthanasie est devenue une procédure « monnaie-courante ». Aux Pays-Bas, la mort par ordonnance a  augmenté de 15% chaque année depuis 2008 et pourrait atteindre 6000 cas en 2014 alors qu’elle n’était « que » de 1923 fin 2005.

 

Son inquiétude va grandissante tandis que de nouvelles catégories de patients intègrent les « indications » d’euthanasie notamment, les personnes démentes et les dépressifs et que sont créées des unités mobiles de médecins « euthanasistes ». Il qualifie la pente euthanasique d’autant plus glissante que ses partisans demandent toujours plus de facilités à sa pratique jusqu’à la création d’une pilule permettant l’auto-administration de la mort pour les plus de 70 ans.

 

En France, nous n’en sommes pas encore là mais on sent que la pression est forte et les partisans de l’euthanasie n’hésitent plus à faire braquer les caméras sur des situations toujours emblématiques et dont l’objectif clairement affiché est de faire basculer l’opinion publique dans leur camp. Je ne reviendrai pas dans le détail sur les affaires très médiatisées et qui, comme par hasard tombent au « bon moment ».  D’abord, l’affaire Bonnemaison, du nom de ce médecin urgentiste accusé d’avoir mis fin à la vie de sept de ses patients et qui a été acquitté mais dont la radiation par le conseil de l’ordre des médecins est effective depuis le début de ce mois[2]. Cette décision a été motivée par le rappel du Code de santé publique qui « interdit au médecin de provoquer délibérément la mort de son patient ». Parallèlement, il y a eu grand bruit autour de l’affaire Vincent Lambert dont le Conseil d’État, suivant le rapporteur public, a requis l’arrêt du traitement mais dont la Cour européenne des droits de l’homme, saisie en urgences par les parents, a suspendu la décision, provisoirement.

 

Ces deux affaires, volontairement médiatisées cherchent à remettre en cause la Loi Leonetti encadrant la fin de vie. Souvent pointée du doigt, elle devrait, selon ses détracteurs intégrée l’idée d’une mort provoquée activement par le soignant en cas de souffrance insupportable et expression d’un désir répété par le patient de voir ses souffrances abrégées.

 

La question centrale tourne-t-elle réellement autour de cette loi, qui, humaine est par essence imparfaite ne peut prévoir toutes les situations, notamment celles qu’on utilise contre elle ?

 

Les deux affaires sus citées, fort heureusement rares, doivent-elles à elles seules déclencher un bouleversement de notre prise en charge de la fin de vie ?

 

Il est facile de deviner la disproportion entre ces cas extrêmes et le risque de la légalisation d’un acte qui ne peut laisser soignants et patients indifférents.

 

Qui n’a pas entendu parler de ces milliers de néerlandais frontaliers avec l’Allemagne, passer outre-Rhin par crainte d’une euthanasie demandée par leurs proches ? Qui ne s’est pas ému, ou à tout le moins interrogé devant l’élargissement de l’euthanasie aux mineurs en Belgique ? Alors que la majorité sexuelle est estimée à 16 ans, un enfant de 12 ans pourra légalement, sans plus de précautions demander à être euthanasié ? Autrement dit, on est immature pour des relations sexuelles mais assez pour décider de sa propre mort…

 

Nous sommes dorénavant prévenus par « l’exemple » de ces pays tout autant que par la pente glissante sur laquelle a évolué l’avortement ces quarante dernières années. D’une loi d’exception, on a récemment vu supprimer la notion de « détresse » dans les éléments qui justifiaient son acte pour le voir désormais évoluer vers un droit acquis et généralisé.

 

Malheureusement, toute législation qui libérera le mauvais génie de l’euthanasie pourra témoigner à coup sûr d’ici quelques années de sa normalisation dans les situations de fin de vie. Peu nombreuses seront les personnes à la refuser, tant la culpabilité d’être un poids dans une culture en crise financière sera grande et le sentiment d’inutilité dans une culture du déchet prégnant[3]. Ensemble, faisons mentir le Professeur Testart qui, en matière d’éthique disait récemment : « on finit par s’habituer à tout » en rappelant qu’en France, « Fraternité » et « Solidarité » ne sont pas de vains mots.

• Doketik

Octobre 2014

 

1- http://www.dailymail.co.uk/news/article-2686711/Dont-make-mistake-As-assisted-suicide-bill-goes-Lords-Dutch-regulator-backed-euthanasia-warns-Britain-leads-mass-killing.html

2-http://www.lemonde.fr/sante/article/2014/07/01/le-dr-bonnemaison-acquitte-mais-radie-de-l-ordre-des-medecins_4448342_1651302.html

3- http://www.zenit.org/fr/articles/le-pape-deplore-les-fruits-amers-de-la-culture-du-dechet